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S'échapper de la réalité 🇸🇪

Lorsque je me suis soudain retrouvée dans une pièce avec d'autres adultes, j'ai vite compris, après seulement quelques minutes de conversation, que je m'étais retrouvée dans la catégorie "Bébé géant" ou "enfantine" aux yeux des femmes du même âge. Ici, en tant que femme de 46 ans, j'ai eu le culot de dire que comme plus grand hobby, j'aimais jouer aux jeux vidéo. Je crois que je n'ai jamais vu autant de personnes rouler des yeux en même temps et complètement sans le cacher, ni cet air légèrement supérieur sur les lèvres qu'avaient les visages qui me fixaient.

Tu sais ce trait de caractère que les adultes aiment avoir lorsqu'ils parlent à un enfant. Mais ce ne sont pas les paroles qui se demandaient s'il n'était pas temps de grandir qui m'ont fait hausser un sourcil parce que je les ai entendues tellement de fois au fil des ans que je ne réagis plus. C'est le discours sur les raisons qui vous poussent à jouer à des choses si irréelles, si éloignées de la vraie vie, qui m'a fait rire de ces choses hargneuses et peu féminines.

Oui, toi Karen, c'est un peu le but du jeu. Ce n'est pas comme si le marché du jeu serait très intéressant si le jeu vidéo que tu achetais consistait à aller faire un travail relativement infructueux qui tue lentement ta joie de vivre huit heures par jour. Tu as joué quand tu as obtenu ta seule tranquillité de la journée les cinq minutes où tu t'es enfermé dans la salle de bain pour faire semblant de faire caca alors tu n'avais qu'à expirer et à faire défiler ton téléphone avant qu'il ne soit temps d'essuyer le nez des enfants morveux pendant que tu prépares un dîner de macaronis instantanés et de boulettes de viande, que tu nettoies la cuisine des miettes pour la quatrième fois de la journée et que tu t'enfonces dans le canapé devant Netflix et que tu t'endormes devant ta série préférée avant que l'horloge ne sonne neuf coups de minuit.

C'est le cas que nous, qui jouons, voulons un peu d'évasion de la réalité. Pour moi, le jeu représente tellement de choses incroyables. Certains jours, c'est une soupape. S'il y a eu beaucoup de choses au travail ou à la maison qui m'ont irrité ou rendu grincheux, tous les sentiments s'envolent après une heure passée derrière la manette. Si je suis triste, je peux me déconnecter de mes émotions pendant un moment et faire tourner mon cerveau autour d'autre chose, c'est-à-dire ce qui se passe à l'écran. C'est une façon de se détendre qui me rend calme et déstressé, ce qui est difficile à expliquer à quelqu'un qui ne joue pas lui-même et qui n'en voit pas l'avantage.

Et il n'y a pas que les jeux qui ont le même effet. Un bon livre dans lequel se plonger fonctionne un peu de la même façon. Un film divertissant à regarder sous une couverture avec un bol de pop-corn fonctionne aussi. La musique est aussi une sorte de médicament pour se détendre et se sentir bien. Mets une paire d'écouteurs et laisse-toi emporter par les airs de tes groupes préférés qui font rugir ton cœur. Et c'est un peu de ce mélange qui me fait me sentir bien, qui me permet de rester en bonne santé mentale quand tout l'océan est en pleine tempête. Et vu la façon dont la vie se présente aujourd'hui, alors que la famille essaie de comprendre que mon père a un cancer du poumon, j'ai besoin de ça plus que jamais.

C'est un peu ce qui me pousse à ne pas ouvrir la porte d'entrée et à crier le plus fort possible que ça suffit maintenant ! Nous avons eu notre dose de misère une centaine de fois, alors ça aurait été bien d'avoir une petite pause ! Une petite, une toute petite. Et les jeux vidéo ont toujours été une chose chargée lorsqu'il s'agit de familles. Lorsque les enfants s'assoient et jouent quelques heures par jour, les parents s'arrachent les cheveux d'inquiétude. Mais au moins, tu sais où se trouve ton enfant. Il est assis là, en sécurité et entier, et il s'amuse. Peut-être a-t-il aussi besoin de se déconnecter de quelque chose ? Dans ma vie actuelle, il y aura une heure ou deux d'évasion de la réalité tragique qui, en ce moment, s'écrit cancer.

Alors pendant un moment, chaque soir avant que la lumière ne s'éteigne, j'appuie sur ma console et j'entends le son familier du menu démarrer. Je marche devant mes étagères et passe mon doigt sur tous les titres de jeux et je pense à l'endroit où je veux voyager aujourd'hui, à qui je veux être. Dernièrement, c'est Hogwarts Legacy qui a occupé mon temps et c'est un jeu parfait dans lequel je me suis plongée. Il est douillet et grand et il faudra de nombreuses heures pour en venir à bout et surtout, le jeu met en marche mon cerveau d'écureuil pour collecter et ensuite je deviens comme un chien avec une balle de tennis.

Et c'est là toute la beauté des passe-temps, ils nous donnent exactement ce dont nous avons besoin pour faire face. Certains courent pour se sentir bien, d'autres tricotent un pull ou deux et quelqu'un peut jouer au golf. C'est juste que ceux qui ont les autres centres d'intérêt n'ont pas à entendre qu'ils devraient grandir et arrêter de courir comme un gamin sur la piste de course, ou produire inutilement des pulls qui grattent et dont aucun petit-enfant ne veut vraiment ou un passe-temps qui n'est réservé qu'à ceux qui l'ont un peu mieux que tous les autres. Les jeux m'ont permis de traverser tellement de choses dans ma vie, peut-être mieux qu'aucune thérapie n'aurait pu le faire.

Lorsque ma mère est décédée, j'ai passé de nombreuses heures sur Street Fighter II et Ryu et Dhalsim m'ont fait sortir la tête de l'oreiller. Lors de mon divorce qui a mis fin à vingt ans de mariage, c'est Leon S. Kennedy qui est devenu mon compagnon pendant que je révisais Resident Evil 2 et Resident Evil 4. Il m'a permis d'arrêter de m'appesantir et de passer à autre chose. Et non, les jeux vidéo ne sont pas un remède miracle, mais ils permettent d'échapper à la réalité quand on en a besoin, alors merci à Sony, Xbox et Nintendo d'avoir été mon psychologue pendant toutes ces années. Une béquille qui permet de passer plus facilement à autre chose.

Ton jeu t'a-t-il aidé à surmonter quelque chose de difficile ?